Motion d’Avocats Européens Démocrates sur l’arrêt de la Cour suprême espagnole sur l’affaire du référendum catalan

Motion d’Avocats Européens Démocrates (AED) sur l’arrêt de la Cour suprême espagnole sur l’affaire du référendum catalan

Berlin, le 23 novembre 2019

L’AED a participé avec dizaines d’organisations internationales dans l’observation du procès sur l’affaire du référendum catalan. Dans une déclaration faite en février dernier nous avons mis en garde contre l’absence de garanties procédurales et le risque de bafouer les droits de l’homme des accusés en cas de condamnation.

Lundi 14 octobre, la Cour suprême espagnole a rendu un arrêt sans précédent en Europe, condamnant les dirigeants politiques et sociaux catalans à 100 ans de prison au total. Dans cette arrêt, les manifestations pacifiques ou la résistance pacifique représentaient le crime de sédition (“soulèvement public et tumulte”). Cette phrase restreint clairement l’exercice de la liberté d’expression, le droit de réunion pacifique, ainsi que la participation politique publique.

La Cour a abandonné les accusations de rébellion portées par le Procureur de la République, mais a prononcé des peines sévères pour les crimes de sédition, de détournement de fonds publics et de désobéissance dans le cadre du référendum sur l’indépendance de la Catalogne, le 1er octobre 2017.

L’AED rappelle que le référendum était un acte non violent de désobéissance civile, organisé pacifiquement pour permettre à de nombreux Catalans de faire entendre leur voix. La seule violence du 1er octobre a été perpétrée par la police espagnole, dans des actes de violence disproportionnée.

L’AED observe que

  • Il s’agit de procédures politiques, de poursuites judiciaires contre des personnes pour leurs idées politiques.
  • Les peines d’emprisonnement imposées représentent une erreur historique qui, loin de résoudre le problème, l’aggrave.
  • Les pouvoirs du Royaume d’Espagne n’ont rien fait pour résoudre cette situation, qui aurait dû être résolue politiquement par le dialogue, et non par la participation du pouvoir judiciaire et donc par l’intervention du Procureur, directement nommé par le gouvernement espagnol.
  • Loin d’apporter une solution, le verdict contre les prisonniers politiques déplace le conflit vers l’arène européenne et les tribunaux internationaux de justice, ce qui ne résoudra pas non plus le problème. Si la communauté internationale, en particulier l’Union européenne, ne joue pas un rôle actif dans la résolution du conflit, un appel international au dialogue et à une solution pacifique et démocratique est nécessaire.

 L’AED condamne la violation des Droits de l’Homme (droits civils et politiques énumérés et reconnus par les Traités et Conventions dûment signés par le Royaume d’Espagne), la violation des principes pénaux et procéduraux, ainsi que les principes de fragmentation, de proportionnalité et de dernier recours du droit pénal, par cette procédure pénale et l’arrêt du 14 octobre 2019.

La violation grave des droits et principes susmentionnés dans cette phrase et sa logique rendent impossible une analyse d’un point de vue strictement juridique. Toute tentative sérieuse d’interprétation de cette phrase fondée sur des concepts techniques et juridiques, tels que la sédition, le soulèvement, la violence ou les droits fondamentaux, échoue partiellement. La raison en est qu’il s’agit d’une résolution idéologique visant à remplacer la solution politique nécessaire dans le conflit en Catalogne.

L’AED demande aux pouvoirs exécutifs des gouvernements espagnol et catalan de chercher, par le dialogue et le compromis, à mettre fin à la réponse criminelle au problème politique sous-jacent, à mettre fin à la répression policière, à libérer les prisonniers et à demander le retour des exilés en toute sécurité et, enfin, à entamer une négociation pour trouver une solution politique au conflit basée sur le dialogue et le respect.