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Le SAD, la LDH et l’ASM incitent les citoyens à interroger les politiques pour sauvegarder une Justice efficace et indépendante

Dans une carte blanche publiée le 13 novembre 2025 (https://www.lesoir.be/710597/article/2025-11-13/droits-et-libertes-ne-laissons-plus-les-politiques-eluder-la-question), le Syndicat des Avocats pour la Démocratie (SAD), la Ligue des Droits Humains (LDH) et l’Association Syndicale des Magistrats (ASM) dénoncent l’affaiblissement systématique du pouvoir judiciaire. Cette rupture de l’équilibre des pouvoirs devrait tous nous inquiéter! Sans cet équilibre, les droits individuels et collectifs ne sont plus protégés. Ce qui se passe outre-Atlantique devrait tous nous alarmer au plus haut point. Voici le texte de la carte blanche:

On entend souvent, dans la bouche des avocats et des magistrats, parler de « l’Etat de droit ».  C’est un concept qui peut paraitre abstrait mais qui se trouve au cœur de la Démocratie. Que veut-il dire ?

L’« Etat de droit », cela signifie, simplement, que le pouvoir ne doit pas être concentré entre les mains d’un seul individu ou organe, qu’il doit exister des mécanismes pour garantir que les uns ou les autres n’abusent pas de leur pouvoir et que les droits de chacun soient respectés. En Belgique, le « parlement » vote les lois et exerce un contrôle politique sur l’exécutif. L’exécutif doit exécuter de bonne foi les lois. Le pouvoir judiciaire contrôle que tous respectent la Constitution, les Conventions internationales et les lois.

Ce système n’est pas né par génération spontanée. Il est le fruit de nombreuses luttes menées par les peuples pour obtenir une société plus juste. Elles ont permis, d’abord, que les gens acquièrent des droit – comme le droit à un salaire minimum ou les congés payés – et, ensuite, que les gens puissent les faire respecter. Comment ? En disposant d’un recours effectif devant les Cours et Tribunaux.

Les Cours et Tribunaux sont les garants, pour les citoyens, de l’exercice effectif de leurs droits. Les magistrats du ministère public ont le devoir de poursuivre les « criminels » pour assurer la sécurité de chacun.  Les Cours et Tribunaux sont là pour statuer sur les litiges qui opposent les citoyens à l’Etat belge (exécutif, législatif et même judiciaire) ainsi que sur ceux entres personnes privées. Des procès ont lieu quotidiennement dans tous les domaines de la vie en société. N’importe qui peut un jour faire face à un problème impossible à résoudre à l’amiable. Il est donc essentiel, pour nous citoyens, de pouvoir avoir accès à une justice de qualité.

Pourtant, les politiques n’ont cessé d’adopter des lois, des budgets et des comportements qui amoindrissent drastiquement la capacité du pouvoir judiciaire à assumer ses compétences constitutionnelles. En pratique, cela signifie que les gens ne peuvent plus obtenir une résolution de leurs problèmes dans un délai raisonnable.

Pire, ces derniers temps, l’exécutif a publiquement annoncé qu’il n’allait pas respecter certaines décisions qui le dérangent.

C’est grave. Dans son rapport 2025 « L’État de droit et les droits humains en Belgique », l’Institut fédéral des droits humains (IFDH), organe indépendant créé pour surveiller la situation des droits humains en Belgique, tire une sonnette d’alarme. Le rapport pointe notamment la non-exécution des décisions de justice par les autorités belges, l’insuffisance chronique des moyens financiers de la Justice, impliquant un arriéré judiciaire inacceptable, la tendance claire à transférer des compétences en matière de maintien de l’ordre et de lutte contre la criminalité du pouvoir judiciaire vers les administrations.

L’affaiblissement progressif mais systématique du pouvoir judiciaire constitue un cercle vicieux. L’exécutif ne donne pas les moyens à la Justice pour remplir ses missions. La Justice est blâmée de « ne pas faire son travail ». Ses compétences lui sont retirées au profit de l’exécutif. Les citoyens ne disposent plus de recours effectifs, rapides et financièrement abordables. Les crimes et délits ne sont plus investigués pour « défaut de capacité d’enquête », alors même que l’investigation des fraudes sociales/fiscales devrait rapporter de l’argent au Trésor.

Cet affaiblissement est catastrophique pour nos droits et libertés. L’exécutif est, par définition, partisan. Ses décisions ne résultent pas d’organe dont l’indépendance et l’impartialité est garantie au travers d’un statut protecteur. Les citoyens ne bénéficient pas du droit au procès équitable devant les administrations.

Au stade critique de délabrement (bâtiments, ressources humaines ou informatiques) auquel nous sommes arrivés, il faut oser poser ces questions : l’affaiblissement continu du pouvoir judiciaire est-il délibéré ? est-ce le choix qu’en tant que société nous souhaitons faire ?

Il s’agit d’une voie extrêmement dangereuse qui signe la fin de la Démocratie. Concentration de pouvoir, affaiblissement des contrepouvoirs, concentration de richesse, pauvreté, injustice, inégalités ne mènent à rien de bon. Tout cela entraine repli sur soi, haine et violence. Nous devrions apprendre de l’Histoire et agir quand il est temps. Nous devrions prendre au sérieux ce qui se passe outre-mer, où Trump viole quotidiennement le cadre démocratique. Politisation du judiciaire et refus d’obéir aux décisions de justice y impliquent détournement des fonds publics, licenciement massif dans les administrations, destruction des services publics, destruction des agences fédérales de contrôle (finance/travail/environnement), expulsions illégales, arrestations et détentions arbitraires, y compris de citoyens américains, armée dans les rues, violation de la liberté d’expression, etc.

Il est encore temps de préserver, ici, l’Etat de droit. Exigeons du politique qu’il garantisse le refinancement de la Justice à la hauteur des besoins de ce troisième pouvoir, nécessaire pour vivre en Démocratie, indispensable pour garantir l’exercice de tous nos droits. L’actualité nous prouve en effet, encore une fois, qu’allouer des fonds relève de la volonté politique. Le rapport de l’IFDH rappelle que « le budget du système judiciaire belge est inférieur à la moyenne européenne (…) la Belgique consacre seulement 0,22 % de son PIB à la justice » (p.19), alors que le gouvernement vient de s’engager à dépenser 5% du PIB pour la Défense, vingt-trois fois plus ! Tout est une question de priorité. La préservation de l’Etat de droit devrait être l’une des premières.

Interpellation du parti « Les Engagés » à propos de deux projets de loi antidémocratiques

Le SAD, comme bien d’autres associations défendants les droits et libertés fondamentales, est particulièrement inquiet de deux avant-projets de loi portés par un gouvernement dont l’action, à bien des égards, s’inscrit dans une philosophie dont le plein potentiel peut actuellement s’observer aux Etats-Unis.

L’avant-projet de loi Quintin et celui relative aux visites domiciliaires pour arrêter les étrangers en situation irrégulière, décrit par l’office des étrangers comme dangereux pour l’ordre public, constituent une dérive vers l’autoritarisme, une instrumentalisation de la justice et des mesures déraisonnables au regard des buts prétendument recherchés pour leur adoption.

Le SAD a dès lors décidé d’interpeller le parti des Engagés. Voici le texte de cette interpellation :

« Je vous écris au nom du Syndicat des Avocats pour la Démocratie, alerté par le contexte international, européen, flamand, mais aussi belge francophone, afin de vous faire part de nos très vives préoccupations concernant deux projets de lois qui nous paraissent antidémocratiques.


Au niveau international, la situation aux Etats-Unis d’Amérique (USA) apparait plus qu’alarmante. Les politiques de droite qui y sont menées sont catastrophiques pour les populations les plus vulnérables. La situation des nantis prospère. La corruption se déploie. L’autoritarisme s’installe au plein jour. La garde nationale est réquisitionnée sans raison pour attaquer des villes démocrates. Le Président appelle l’armée à faire de ces villes des « terrains d’entrainement ». Les mécanismes de contrôle s’affaiblissent, voire disparaissent. La presse est mise sous intense pression. Le pouvoir législatif est paralysé, sous l’emprise d’un Président dont les facultés cognitives peuvent pourtant être mises en doute. Le pouvoir de l’exécutif ne cesse ainsi d’augmenter, au détriment des principes fondamentaux de la démocratie.

L’Europe, dont la Belgique, connait une triste tendance à prendre la même direction que celle de ce pays qui se prétend être le « meilleur du monde », quand bien même les Américains décèdent par milliers en raison de l’absence d’accès aux soins de santé les plus élémentaires.


Pour le SAD, 
ce qui se passe actuellement aux USA devrait constituer un « rappel à l’ordre » pour tout un chacun. La démocratie est fragile. Les contrepouvoirs sont indispensables. L’exécutif doit être limité dans ses habilités à gérer la vie des individus, personnes physiques comme morales. Le pouvoir judiciaire doit être respecté et entretenu de manière à pouvoir constituer un rempart efficace contre les dérives autoritaires. Le droit au procès équitable, dans toutes ses implications, doit être préservé. 

Telles sont les raisons pour lesquelles le SAD se permet de vous demander instamment de refuser d’entrer dans le jeu d’une « extrême droite » qui, même en Belgique, est décomplexée. Les attaques contre l’Etat de droit sont de plus en plus en plus évidentes, tel le refus affiché d’exécuter les décisions de justice. Les discours racistes ou populistes, prétendant au travers de slogans simplistes, appelant à de bas instincts d’exclusion ou de supériorité, répondre à des problèmes éminemment complexes, ne cessent d’augmenter.

Face à ces phénomènes, il apparait essentiel au SAD de continuer à diffuser et défendre les valeurs de pluralisme, d’égalité et de solidarité et de refuser, avec ténacité, de mettre le pied dans un engrenage autoritariste qu’il pourrait être impossible d’ensuite stopper.

Pour le SAD, le projet de loi Quintin est éminemment antidémocratique. Il constitue un risque indubitable pour la liberté d’expression et d’association. Les conditions de sa mise en œuvre relèvent du droit pénal. Les notions évoquées sont floues. Les sanctions que le projet permet sont drastiques. Elles relèvent de la panoplie qu’un juge peut appliquer. Elles sont pourtant prises par l‘exécutif, instance qui ne présente pas de garanties d’indépendance et d’impartialité. Encore, pourquoi forcer les personnes à se défendre après qu’une sanction injuste ait été prise, plutôt que de garantir un processus équitable avant l’adoption de telles sanctions ? Les prétendues garanties figurant dans le projet Quintin n’en sont en effet pas. Cette loi, qui a supposément pour objectif de protéger l’État de droit, en viole les principes de base : la séparation des pouvoirs. L’Institut fédéral pour la protection des droits humains, organisme indépendant, dénonce ainsi un impact disproportionné sur la liberté d’expression et d’association (cf. https://institutfederaldroitshumains.be/fr/avis-sur-une-interdiction-dorganisations-considerees-comme-extremistes-ou-radicales-et-dangereuses). Ce projet de loi est un précédent dangereux qui permettrait d’interdire toutes sortes d’organisations issues de l’ensemble de la société civile. Les moins fortunés/éduqués ne disposeront pas de recours effectif, en droit comme en pratique. Il peut d’ailleurs être souligné que ce type de loi est mis en avant par des leaders politiques tels que Trump aux États-Unis ou Orbán en Hongrie, qui cherchent à criminaliser l’antifascisme et d’autres mouvements sociaux. Pour le SAD, ce projet est clairement liberticide. Il ne convient pas de donner plus de pouvoir à l’exécutif pour répondre aux problématiques évoquées pour le justifier, il faut renforcer le pouvoir légitimement appelé à y répondre : le pouvoir judiciaire.

Dans la même veine, le projet de loi permettant des rafles au domicile des personnes migrantes, ainsi qu’aux domiciles d’hébergeur·euse·s solidaires de personnes migrantes, apparait contraire aux valeurs démocratiques. Il constituera un précédent dangereux concernant cette protection constitutionnelle (art. 15). Il s’agit également d’une triste instrumentalisation de la justice. Les juges d’instruction ne sont pas formés dans cette matière extrêmement technique qu’est devenue le droit des étrangers. Ils sont déjà surchargés de travail. De plus, le projet aura pour conséquence que les étrangers n’oseront plus essayer de régulariser leur situation, même s’ils ont des enfants. Ils prendraient alors le risque de perdre leur logement en cas de décision négative. Or, l’Office des étrangers prend de nombreuses décisions illégales. L’arrêt Sahiti contre Belgique rendu par la Cour européenne des droits de l’homme ce 9 octobre 2025 en est une parfaite illustration. La Belgique est condamnée pour avoir violé le droit à la vie privée et familiale du requérant parce qu’il « suffit à la Cour de constater que les autorités compétentes n’ont toujours pas statué de manière définitive sur la demande d’autorisation de séjour introduite par le requérant il y a quinze ans, en dépit des nombreux recours exercés et des arrêts rendus par le CCE annulant les décisions négatives de l’OE » (§.84). Mesdames, Messieurs, sans résoudre aucunement « le problème de l’immigration illégale », ce projet de loi rendra encore plus vulnérable une population de plus en plus souvent présentée comme à l’origine de tous les maux de nos sociétés. Vous ne pouvez pas ignorer que tel n’est pas le cas. La disparité de la répartition des richesses constitue une cause bien plus importante tant des phénomènes migratoires que des difficultés rencontrées par nos Etats démocratiques. Criminaliser et effrayer cette population vulnérable n’est pas une solution. Si l’on veut lutter contre les séjours irréguliers, ne serait-il pas plus efficace de contrôler les sociétés actives dans les domaines qui emploient notoirement cette main d’oeuvre bon marché ? Myria, organisme indépendant, a analysé et critiqué le projet de loi sur les visites domiciliaires pour arrêter les étrangers (cf. https://www.myria.be/files/2025_MYRIA_Avis_avant-projet_de_loi_visites_domiciliaires.pdf). Son évaluation est sans appel.

Ces deux projets, Mesdames, Messieurs les responsables politiques, ne peuvent être déliés d’un contexte global de montée de l’autoritarisme et de durcissement des politiques migratoires. L’humanisme et la raison perdent gravement du terrain. N’est-ce pas s’aveugler et dénier leur humanité aux migrants, en effet, que de prétendre que la Tunisie, le Maroc ou l’Egypte seraient des pays tiers surs, comme l’Europe vient de le faire ? Comment une personne raisonnable, face aux rapports concordants des ONG dénonçant les graves violations des droits humains dans ces Etats, et notamment des migrants, peut-elle le soutenir ?  

Le SAD est extrêmement inquiet de ces dérives, qui l’une après l’autre pavent la voie de l’extrême-droitisation de la société. Les projets de lois dont question constituent clairement un pas dans cette mauvaise direction. Il s’agit, pour le SAD, d’une ligne rouge à ne pas franchir. S’agit-il vraiment du projet de société qu’entend défendre les Engagés?

C’est la raison pour laquelle le SAD vous demande instamment de refuser de voter ces lois liberticides ».

Lettre de non-recommandation concernant la candidature de Nicole de Moor au poste de Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés (HCR)

Aujourd’hui, 17 associations et 200 avocats écrivent aux Nations Unies pour s’opposer à la candidature de Nicole de MOOR au poste de Haut-Commissaire pour les réfugiés.

Le SAD en fait partie.

Madame de Moor a en effet été secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration. Au cours de son mandat, elle a adopté plusieurs décisions ayant contribué à la détérioration des conditions d’accueil des demandeurs d’asile en Belgique – dont des familles avec enfants et des mineurs non accompagnés –, ce qui va à l’encontre des efforts du HCR de garantir la dignité et les droits des réfugiés. Madame de Moor a pris part à une politique gouvernementale qui a directement conduit à la violation systémique et assumée du droit national, européen et international des réfugiés ainsi qu’au non-respect de décisions de justice. Ces dernières années, la Belgique fait face à une grave crise de l’accueil des réfugiés et depuis l’été 2021, le réseau d’accueil belge est complètement saturé.

Vous pouvez ici mieux prendre connaissance des motifs de cette opposition

De nombreuses associations, dont le SAD, demandent au gouvernement d’agir pour faire cesser l’horreur subie par les Gazaouis

Des paroles stériles sont pires que le silence complice :
agissez aujourd’hui !

Si vous souhaitez joindre votre voix à cet appel, signez la pétitionhttps://www.change.org/GazArizonA-Basta-BLABLA

Nous[1] assistons depuis de nombreux mois au premier génocide télévisé de l’histoire. En Belgique une majorité écrasante de la population demande des sanctions immédiates et une action résolue pour faire cesser les crimes contre l’humanité et l’utilisation de la famine comme arme de guerre. Ce ne sont pas seulement les images et les émotions, ou les appels des Palestinien-nes, mais aussi les chiffres, les rapports officiels et les positions des plus hautes juridictions internationales qui mobilisent la grande majorité de nos concitoyens. Et même des organisations israéliennes qualifient ce qui se passe de génocide[2] !

Le gouvernement fédéral a en main des leviers importants. L’Espagne, l’Irlande, la Slovénie, les Pays-Bas, l’ensemble des pays réunis dans le groupe de La Haye … montrent qu’il est possible, y compris sans attendre une position de l’Union européenne, d’exercer dès aujourd’hui des pressions très importantes sur les dirigeants israéliens. La liste des exemples est longue : reconnaissance immédiate de la Palestine, interdiction de la production et du transit d’armes et de composants d’armes, interdiction d’accès au territoire aux responsables (par exemple Smotrich et Ben Gvir aux Pays-Bas), renvoi de l’ambassadeur, interdiction d’importation des produits des colonies, mettre à l’étude, comme cela a été fait afin de sanctionner la Russie, la possibilité de suspendre l’accès à la plateforme d’échanges financiers Swift… 

Depuis plusieurs semaines, et même si nous sommes nombreux à nous demander pourquoi il a fallu tant de temps, trois partis de la majorité s’expriment abondamment dans les médias, avec de belles expressions d’indignation et des appels passionnés à agir sans attendre. Trois partis sur cinq, c’est évidemment la majorité de ce gouvernement. Surtout depuis que le parti du Premier semble ne plus exclure les sanctions … Ce serait même une majorité écrasante si le débat arrivait au parlement, puisque la totalité des partis démocratiques de l’opposition ont déposé, ou pourraient soutenir, des textes emportant les décisions urgentes qui s’imposent. 

Pourtant, et cela décuple notre indignation, et notre incompréhension, les présidents ou les principaux ministres de ces trois partis continuent de s’exprimer dans les médias comme s’ils étaient chacun un citoyen isolé et impuissant, ou chacun le seul parti courageux de ce gouvernement. Cela doit cesser. Le temps de lire ce communiqué, combien d’enfants seront morts de faim, à quelques kilomètres des camions chargés de vivres, arrêtés par l’armée israélienne ?

Nous adressons solennellement aux dirigeants de Vooruit, du CD&V et des Engagés la demande de passer aux actes sans aucun délai. Qu’il y ait dans leur gouvernement deux partis qui nient le génocide en cours, ce n’est pas notre choix : c’est le leur. Si ces trois partis ne considèrent pas que l’urgence des multiples alertes de famine mérite d’en faire une question de gouvernement, que leur faut-il ? La destruction totale de tout ce qui fonde une société, infrastructures, systèmes d’éducation, de santé, d’alimentation, en vue d’un jour vider le territoire de ses habitants, tout cela constituant un processus de génocide, est-ce pour eux un détail ? ou un simple objet de communication publicitaire ?

Nous leur adressons deux questions très simples :

  • êtes-vous prêts à imposer à ce gouvernement, dont vous formez la majorité,  une décision courageuse et immédiate, quitte à en faire une crise de gouvernement ?
  • Et si ces deux partis – ou un seul –  campent sur leur position de soutien inconditionnel au gouvernement israélien, êtes-vous prêts à chercher avec les autres partis démocratiques une majorité parlementaire sur ce dossier ?

Si vous ne répondez pas clairement « oui » à ces deux questions, alors, par pitié, par respect pour les victimes et toutes celles et ceux qui luttent vraiment pour que ce cauchemar s’arrête, il serait plus décent de vous taire. Les enfants de Gaza qui meurent de faim et de soif ne seront pas nourris par des larmes de crocodiles.

Mais si vous croyez vraiment à ce que vous dites, si vous avez du respect pour les trois quarts de vos concitoyens, pour le parlement, et pour vos propres collègues de parti qui ont signé une foule de motions en ce sens, il faut agir aujourd’hui.


[1] Liste des signataires en annexe du communiqué officiel (en annexe)http://lesad.be/?attachment_id=1130

[2]  Par exemple : B’Tselem ou  “Physicians for human rights”

Turquie : Arrestation et détention arbitraire de l’avocat Ruken Gülağacı Déclaration commune – 21 mai 2025

Les barreaux et organisations de défense des droits des avocats soussignés expriment leur profonde préoccupation concernant la détention de l’avocat Ruken Gülağacı le 20 mai 2025. Le 21 mai, le juge de paix pénal a émis une ordonnance d’assignation à résidence à l’encontre de Mme Gülağacı – une escalade alarmante qui ne fait qu’aggraver notre inquiétude.

Mme Gülağacı est membre du barreau d’Istanbul et membre du conseil d’administration de l’Association des avocats pour la liberté (Özgürlük için Hukukçular Derneği – ÖHD), et représente fréquemment des universitaires, des avocats et des hommes politiques kurdes. Elle est également un membre actif de la Fondation pour la société et les études juridiques (TOHAV), un membre du conseil d’administration de l’Association européenne des juristes pour la démocratie et les droits de l’homme dans le monde (ELDH) et défenseur des droits de l’homme en Turquie.

Dans la soirée du 20 mai 2025, Mme Gülağacı a été arrêtée par des policiers alors qu’elle se rendait à la prison de Kandıra pour rencontrer son client. Elle a passé la nuit au poste de police et a été transférée le lendemain au tribunal de Çağlayan, où elle a fait sa déposition devant le procureur à environ 3 heures du matin.

Selon les avocats qui accompagnent Mme Gülağacı, l’interrogatoire du Procureur visait directement ses activités professionnelles. Elle a été interrogée sur les clients qu’elle représente et ses rencontres avec eux – des actions qui font partie intégrante des missions d’un avocat. Il était évident que son travail professionnel légal, et par extension son droit à la liberté d’expression et d’association, était criminalisé.

À la suite de son interrogatoire, le procureur a déféré Mme Gülağacı au juge de paix pénal avec une demande de contrôle judiciaire sous la forme d’une assignation à résidence. Une assignation à résidence a été délivrée par défaut, sans qu’elle ne soit présentée à un juge, et uniquement sur la base de documents. Aucune justification écrite n’a été fournie pour cette décision, en contradiction directe avec la jurisprudence de la Cour constitutionnelle et en dépit de la requête de son conseil de comparaître en personne. Cette décision, rendue sans respect des garanties procédurales minimales, restera dans les mémoires comme une grave atteinte à l’indépendance de la justice et un affront à l’Etat de droit.

Nous sommes profondément préoccupés par le fait que l’arrestation de Mme Gülağacı et la restriction de sa liberté soient directement liées à son travail d’avocate. L’identification de Mme Gülağacı avec ses clients ou leurs causes est une violation des normes internationales protégeant l’indépendance de la profession juridique.

D’autres irrégularités procédurales jettent un doute sur l’équité de la procédure : Mme Gülağacı n’a pas été autorisée à se défendre en personne devant le tribunal ; et elle a été arrêtée sans notification formelle préalable, alors qu’elle est une avocate en exercice qui fréquente quotidiennement les Cours et Tribunaux. Ces facteurs à eux seuls rendent la procédure d’arrestation défectueuse dès le départ et soulèvent de sérieuses préoccupations quant au droit à un procès équitable.

Ces événements s’inscrivent dans un contexte plus large et troublant. La Turquie est actuellement témoin d’une répression sans précédent à l’encontre de la profession juridique et de la société civile. A la suite des manifestations de masse qui ont suivi l’arrestation du maire d’Istanbul, Ekrem İmamoğlu, des centaines de manifestants ont été placés en détention, souvent sans accès à un avocat ou respect des garanties procédurales. La représentation juridique des dissidents politiques est de plus en plus considérée comme un acte criminel en soi.

Les mesures prises à l’encontre de Mme Gülağacı constituent une ingérence directe et dangereuse dans le droit à la défense, entravent l’accès à la justice et criminalisent encore davantage le travail des avocats représentant des dissidents. Il s’agit d’une érosion de plus en plus importante des garanties d’une justice équitable et de l’État de droit.

En tant qu’État partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et à la Convention européenne des droits de l’homme, la Turquie est tenue de veiller à ce que personne ne soit soumis à une arrestation ou à une détention arbitraire et que toute privation de liberté soit légale et justifiée. Le droit à un procès équitable, y compris la présomption d’innocence et l’accès à une représentation juridique, doivent être respectés à tout moment.

Conformément aux Principes de base des Nations unies relatifs au rôle du barreau :

● Le principe 16 affirme que les avocats doivent pouvoir s’acquitter de toutes leurs fonctions professionnelles sans entrave, intimidation, harcèlement ni ingérence indue ;

● Le principe 18 prévoit que les avocats ne doivent pas être identifiés à leurs clients ou à la cause de leurs clients dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions.

Nous, soussignés, appelons les autorités turques à :

● Lever immédiatement et sans condition l’ordre d’assignation à résidence à l’encontre de Ruken Gülağacı et ordonner la libération de tous les autres avocats détenus uniquement pour avoir exercé leurs devoirs professionnels ;

● Veiller à ce que la détention provisoire et l’assignation à résidence ne soient appliquées qu’en tant que mesures exceptionnelles et en dernier recours, dans le plein respect des procédures régulières et du droit d’être entendu par un juge ;

● Mettre fin à toutes les formes de harcèlement, d’intimidation et de détention arbitraire visant les avocats et s’abstenir d’identifier illégalement les avocats avec leurs clients ou les positions politiques ou sociales de ces derniers ;

● Signer et ratifier rapidement la Convention du Conseil de l’Europe pour la protection de la profession d’avocat, renforçant ainsi son engagement envers le cadre juridique international régissant l’indépendance et la protection professionnels du droit.

Nous continuerons à suivre de près le cas de Mme Gülağacı et la situation plus générale des professions juridiques en Turquie.

Signataires :

● Asociación de Derecho Penitenciario “Rebeca Santamalia” – Estado español (ASDEPRES)

● Asociación Libre de Abogacia (ALA) (Spain)

● Asociación Pro Derechos Humanos de Andalucía (APDHA)

● Avocats Européens Démocrates – European Democratic Lawyers

● Bologna Bar Association (Italy)

● CCBE – Council of Bars and Law Societies of Europe

● Cooperative of Women Lawyers in Barcelona (IACTA)

● Cyprus Democratic Lawyers Association (CDLA)

● Défense Sans Frontière – Avocats Solidaires.

● Democratic Jurists (Italy)

● Democratic Lawyers of Switzerland (DJS-JDS)

● Deutscher Anwaltverein (German Bar Association)

● European Association of Lawyers for Democracy and World Human Rights (ELDH)

● Euskal Herriko Giza eskubideen Behatokia ( Basque Country)

● Foundation Day of the Endangered Lawyer (the Netherlands)

● Lawyer Leonardo Arnau, the Chair of the Human Rights Committee of Consiglio Nazionale Forense (Italy)

● Il Centro di Ricerca ed Elaborazione per la Democrazia ( CRED) (Italy)

● Institut des Droits de l’Homme du Barreau de Montpellier (France)

● Institute for the Rule of Law of the Union Internationale des Avocats (UIA-IROL)

● International Association of Democratic Lawyers (IADL)

● International Observatory for Lawyers in Danger (OIAD)

● Lawyers for Lawyers (the Netherlands)

● Legal Centre Lesvos, (Greece)

● Legal Team Italia

● Le SAD – Syndicat des Avocats pour la Démocratie (Belgium)

● MAF-DAD – Association for Democracy and International Law e.V. (Germany)

● Osservatorio Avvocati Minacciati (Italy)

● Republikanischer Anwältinnen- und Anwälteverein (RAV e.V.) (Germany)

● Socialist Lawyers Association of Ireland

● The Defence Commission of the Barcelona Bar Association

● The Law Society of England and Wales (UK)

● The Norwegian Bar Association

● Turkey Litigation Support Project (TLSP)

● Turin Bar Association (Italy)

● Unione delle Camere Penali Italiane (UCPI)

● Vereinigung Demokratischer Juristinnen und Juristen e.V. (VDJ) (Germany)

● Vereniging Sociale Advocatuur Nederland (VSAN) (the Netherlands)

Le démantèlement du système judiciaire


Les différents intervenants du système judiciaire dénoncent, depuis de très nombreuses années[1], le sous-financement de la Justice. Aujourd’hui, le constat est sans appel : des pans entiers du système ne sont plus soutenus que par la bonne volonté de ses acteurs, partageant la conviction que l’accès à la justice est un droit fondamental, indispensable au bon fonctionnement de notre société, accès qui doit être accessible à tous.

Mais l’Etat, sourd aux appels du monde judiciaire, tire de plus en plus sur la corde.

De nombreux litiges nécessitent l’intervention de tiers : experts (dans le domaine médical ou de la construction, par exemple), traducteurs, dépanneurs, …. Or, l’Etat tarde tellement à payer ses factures que nombre d’entre eux ne souhaitent plus travailler pour la Justice. Ce constat est encore plus criant quand ils doivent intervenir dans le cadre de l’assistance judiciaire.

Les avocats, travaillant dans le cadre l’aide légale, sont payés par l’Etat un an après la clôture de leur dossier. Cette année, l’Etat n’assurera, à la date prévue, le paiement que de 60% de l’indemnité qui leur est due, sans qu’aucune échéance ne leur soit donnée quant au versement du solde. Ce retard de paiement a un impact considérable pour ces avocats, qui doivent continuer à assumer leurs charges habituelles (dont les charges fiscales et sociales, ce qui revêt une certaine ironie). Cela ne peut que décourager celles et ceux qui défendent les personnes les plus vulnérables de notre société. Cela risque d’amoindrir la qualité des services rendus.

Les Juges de Paix, qui sont malades ou qui partent à la retraite, ne sont remplacés par d’autres magistrats « professionnels » qu’après de nombreux mois. L’intérim est assuré par des Juges de Paix suppléants, qui sont en réalité des avocats bénévoles. La charge de ces prestations tend à se multiplier et de moins en moins d’avocats acceptent d’endosser ce rôle. Il leur a en plus été récemment demandé d’accepter une plus grande flexibilité géographique, afin de pallier la pénurie. Cela ne constitue évidemment pas une solution à des vacances prévisibles. Le risque de devoir annuler des audiences, faute de Juge, est réel.

L’Etat reste également en défaut de remplir les cadres, c’est-à-dire de nommer le nombre de magistrats prévus par la loi. Cela entraîne une charge de travail disproportionnée pour les juges, conduisant à des arrêts maladie, ce qui accroît encore le problème. Les répercussions sur les justiciables sont déjà bien présentes : l’arriéré judiciaire de certaines juridictions ne permet plus une prise en charge efficaces des dossiers. Ceci cause non seulement un effet préjudiciable pour les justiciables directement impactés mais également un sentiment général de désaffection envers la Justice, pourtant victime, au même titre que les individus, du détricotement de la Justice par le politique.

De plus en plus, on constate aussi le classement sans suite des dossiers ou l’absence de réaction efficace à la criminalité en tout genre en raison d’une absence de « capacité d’enquête » pour les traiter.

La vétusté de certaines infrastructures témoigne encore du mépris envers les acteurs de la Justice et toutes les personnes qui en dépendent.

Parallèlement, l’Etat a adopté une série de mesures augmentant le coût de la Justice pour les justiciables : contribution forfaitaire due par le bénéficiaire de l’aide juridique[2], contribution au Fonds d’aide juridique de deuxième ligne pour tout justiciable condamné, augmentation des droits de greffe ou instauration de la TVA sur les prestations des huissiers et avocats. L’Etat n’avait aucune obligation d’imposer une TVA sur les honoraires d’avocats et, de ce fait, d’augmenter la facture des justiciables, personnes physiques[3], de 21% !

Ces « économies de bout de chandelle » sont d’autant moins compréhensibles que des magistrats disposant des moyens adéquats pourraient, notamment, lutter efficacement contre la fraude fiscale et sociale organisée, alors qu’actuellement elle poursuit surtout les « petites gens ». Le SPF Sécurité Sociale renseigne que « l’économie souterraine (c’est-à-dire l’économie illégale + l’économie noire) représente à peu près 3,8% du Produit Intérieur brut (PIB) en Belgique, soit 12,9 milliards d’euros »[4]. Comment expliquer que l’Etat belge ne donne pas les moyens de faire respecter ses propres règles ? A quoi servent-elles alors, sinon à donner la fausse impression que l’on agit en votant des textes qui demeurent lettre morte ?

L’Exécutif semble oublier que la Justice constitue un des fondements essentiels de la Démocratie : elle représente l’unique alternative à la loi du plus fort. De plus en plus de justiciables, confrontés à ces difficultés d’accès à la justice qui s’apparentent dorénavant à de véritables dénis de justice, menacent de régler leurs problèmes par la violence.

Le récent mouvement des magistrats constitue une illustration du mal-être de tous les acteurs du système judiciaire. Si certains moyens d’actions choisis posent question[5], ils témoignent d’un sursaut d’indignation de la part d’une profession qui s’est trop longtemps tue sur une catastrophe pourtant annoncée, à défaut d’investissement décent.

Le désinvestissement structurel dans la Justice peut sembler lointain à certains citoyens. Pourtant, sans investissement suffisant dans le pouvoir judiciaire au sens large, ce sont notamment des jeunes qui ne pourront pas être pris en charge en cas de maltraitance, des parents qui ne verront pas traiter en temps opportun les question liées à une séparation, des entreprises qui verront s’éterniser des litiges et perdurer l’incertitude, des victimes qui ne verront pas leur plainte investiguée, des policiers qui demeureront avec un sentiment d’impuissance, des délinquants qui agiront sans réaction de la part de la société, …

Les annonces de la Ministre de la justice d’investir dans les structures d’enfermement ne fait aucun sens face aux réels problèmes qui se posent. Elles sont par ailleurs contradictoires avec le nouveau Code pénal, voté en 2024, qui prescrit que la peine d’emprisonnement doit demeurer le « remède ultime ». C’est donc dans les peines alternatives qu’il faudrait investir.

Dans l’intérêt de toutes et tous, il est grand temps que le monde judiciaire et les justiciables s’unissent pour défendre une Justice indépendante et dotée de moyens suffisants. Un Justice digne de ce nom est indispensable au bon fonctionnement de notre société et un contrepouvoir nécessaire, comme on peut le voir actuellement aux Etats-Unis, en cas de dérives autoritaires.


[1] Depuis 2015, les acteurs de la justice se mobilisent chaque année le 20 mars. Notamment : https://lesad.be/manifestation-le-20-mars-2024-12h30-letat-de-droit-jy-crois-les-revendications/

[2] Diverses associations se sont mobilisées contre cette mesure, ce qui a conduit à son annulation par la Cour constitutionnelle. Voir « Arrêt de la Cour constitutionnelle du 21 juin 2018 : suppression des contributions forfaitaires », https://latribune.avocats.be/fr/arret-de-la-cour-constitutionnelle-du-21-juin-2018-suppression-des-contributions-forfaitaires

[3] Les personnes morales et les indépendants peuvent déduire la TVA, de sorte que pour eux la mesure était « neutre ».

[4] https://socialsecurity.belgium.be/fr/activites-internationales/ampleur-de-la-fraude-sociale-et-fiscale-sublec#:~:text=Pourtant%20on%20peut%20estimer%20que,3%25%20du%20PIB%20en%20Hollande

[5] En particulier, le SAD ne peut que rejoindre la critique formulée par l’Observatoire International des Prisons relative à l’envoi de nouveaux écrous, au blocage des libérations conditionnelles et des surveillances électroniques, tout en poursuivant les procédures de révocation, qui n’ont d’autres effets que d’aggraver les problèmes de surpopulation carcérale. Cf. https://www.oipbelgique.be/parquet-de-bruxelles-absence-aux-audiences-du-tribunal-de-lapplication-des-peines-indignite-et-surpopulation-carcerale/