Incitation indirecte au terrorisme, pour la Cour constitutionnelle tout est clair

28 janvier 2015

Incitation indirecte au terrorisme, pour la Cour constitutionnelle tout est clair

Dans son arrêt du 28 janvier 2015, la Cour constitutionnelle avalise l’incrimination de « l’incitation indirecte à commettre une infraction terroriste ».

Pour le SAD, ainsi que pour la CNE et la Ligue des droits de l’homme, cette nouvelle infraction était loin de revêtir les caractères de précision et de clarté, exigés tant par la Constitution que par la Convention européenne des droits de l’homme, en matière pénale. Elle est également extrêmement dangereuse pour les libertés de penser et de s’exprimer.

En effet, que signifie « inciter au terrorisme » si l’on admet que les propos tenus ne doivent pas en eux-mêmes inviter à la violence ou à la haine ? Que recouvre « l’incitation indirecte au terrorisme » lorsqu’il n’est pas requis qu’il soit question d’un acte terroriste précis, ou même indéterminé, et encore moins qu’il ait été commis ou soit en voie de commission ? Comment pouvoir prévoir qu’un discours pourrait être interprété comme « incitant indirectement au terrorisme » ? La critique radicale de la politique de nos « alliés », par exemple, restera-t-elle possible ?

L’adjectif « indirecte » a ici toute son importance. La Cour constitutionnelle estime que cela ne pose cependant pas de problème. Elle expose que :

« « Inciter » signifie pousser quelqu’un à faire quelque chose (en néerlandais : aanzetten). En conséquence, il ne suffit pas que le message diffusé ou mis à la disposition du public préconise directement ou non la commission d’infractions terroristes et crée le risque qu’une ou plusieurs de ces infractions puissent être commises. Il faut encore qu’il soit prouvé que la personne qui diffuse le message ou le met à la disposition du public ait eu pour intention de pousser autrui à commettre une infraction terroriste (…)
 « Préconiser » signifie recommander vivement (en néerlandais : aansturen). En incriminant le comportement qui préconise directement ou non la commission d’infractions terroristes, la disposition attaquée permet à la personne qui diffuse le message ou le met à la disposition du public de savoir qu’elle se met en infraction, que ce message dise clairement (préconisation directe) ou non (préconisation indirecte) que des infractions terroristes doivent être commises, ce qu’il appartient au juge d’apprécier en fonction de tous les éléments de la cause ».

Oui mais : comment pousser indirectement quelqu’un à faire quelque chose ? comment démontrer l’intention d’une personne qui n’a pas formulé de message de violence ou de haine ? comment recommander vivement mais indirectement ?

Le SAD regrette la trop large marge d’appréciation laissée au juge du fond dans ce domaine du terrorisme. L’histoire nous a déjà démontré que les interprétations divergentes étaient trop aisées, ce qui nuit à la sécurité juridique. Par ailleurs, le « terrorisme » est une notion compliquée, qui touche parfois à la politique. Ce mot véhicule également tellement de peur et d’appréhensions qu’il est nécessaire d’encadrer clairement ce qui est répréhensible et/ou ce qui ressort des libertés de penser et de s’exprimer.

CC 28.01.2015