Communiqué de la Plateforme « Justice Pour Tous » – 22 juin 2018
C’est une victoire importante pour la trentaine d’associations qui avaient déposé un recours contre la réforme de l’aide juridique entrée en vigueur en septembre 2016. La Cour constitutionnelle a tranché ce jeudi 21 juin 2018 : le ticket modérateur institué par la réforme est contraire à la Constitution. Pour autant, la réforme reste en vigueur dans ses autres aspects et continue de décourager l’accès à la justice des plus précaires.
Une victoire pour l’aide juridique !
Lorsque le ministre Geens a introduit un « ticket modérateur » sur les services d’un avocat pro deo en 2016, une vingtaine d’organisations, notamment membres de la Plateforme Justice Pour Tous, ont immédiatement réagi. En s’ajoutant à la TVA sur les services des avocats et au durcissement des conditions et de la procédure pour obtenir un avocat pro deo, l’introduction d’une contribution financière avait rendu l’accès à la justice encore plus difficile.
Le droit d’accès à la justice est donc devenu une illusion pour beaucoup de gens. Et ce malgré le fait que notre Constitution stipule expressément que chacun a droit à l’aide juridique et que le législateur ne peut porter atteinte au niveau actuel de protection de ce droit.
Le 21 juin 2018, la Cour constitutionnelle a donné raison aux associations, en particulier sur la question du ticket modérateur. Les juges de la Cour constitutionnelle ont explicitement déclaré qu’il est en effet contradictoire de demander une contribution financière aux personnes qui réclament un avocat pro deo précisément parce qu’elles n’ont pas les moyens nécessaires pour payer elles-mêmes un avocat.
Les juges ont également attiré l’attention du législateur sur la réalité : l’introduction d’une contribution forfaitaire de 50 euros représente un pas en arrière considérable pour les personnes disposant de peu de ressources, ce qui est incompatible avec l’article 23 de la Constitution, qui garantit à chacun le droit à l’aide juridique.
Les juges de la Cour constitutionnelle mettent également en garde : si le législateur peut déterminer que le droit à l’aide juridique dépend de la preuve de « moyens d’existence insuffisants », cette notion juridique ne peut servir à exclure du système des personnes qui n’auraient pas accès à un juge sans l’aide juridique.
Nécessité d’une réforme en profondeur
Malgré l’avancée importante réalisée par cet arrêt, le droit d’accès à la justice reste une illusion pour de nombreuses personnes. Les associations requérantes et les organisations qui font partie de la Plateforme Justice Pour Tous rencontrent quotidiennement ces personnes : les personnes qui ne trouvent pas à temps les documents nécessaires pour prouver qu’elles ont droit à un avocat pro deo, les personnes qui, en raison de la disponibilité limitée de conseils juridiques de première ligne accessibles, ne savent pas qu’elles ont droit à un avocat pro deo, etc.
Pour toutes ces personnes, les membres de la Plateforme Justice Pour Tous continuent de revendiquer une réforme en profondeur de l’aide juridique de première et de deuxième ligne et un droit effectif d’accès à la justice pour tous.
La Plateforme demande donc au ministre de la Justice d’ouvrir rapidement le débat sur la manière dont nous pouvons créer en Belgique une aide juridique qui puisse garantir à chacun le droit d’accès à la justice.
Les requérants
Aimer Jeunes, *Association pour le Droit Des Etrangers, *Association Syndicale des Magistrats, ATD Quart Monde en Belgique – ATD Vierde Wereld in België, Belgisch Netwerk Armoedebstrijding – Réseau belge de Lutte contre la Pauvreté, *Atelier des droits sociaux, *Service droit des jeunes, Défense des Enfants – International – Belgique – Branche francophone, *CIRE – Coordination et Initiatives pour et avec les Réfugiés et Etrangers, Intact, *Ligue des droits de l’Homme, *Ligue des familles, Luttes Solidarités Travail, Organisatie voor Clandestiene Arbeidsmigranten, Médecins du Monde, *Medimmigrant, Planning familial Leman, Point d’appui, *Réseau Wallon de Lutte contre la Pauvreté, Service d’action sociale bruxellois, Service international de recherche, d’éducation et d’action sociale, Service social de solidarité socialiste, *Syndicat des Avocats pour la Démocratie, Ulysse, Vlaams Netwerk van verenigingen waar armen het woord nemen, Vluchtelingenwerk Vlaanderen, Woman’do et des CPAS d’Evere, de Forest et de Saint-Gilles.
*Membres de la Plateforme Justice Pour Tous